Pendant la crise sanitaire, le mécénat s’est affirmé, mais le contexte économique à venir pourrait impacter la capacité des entreprises à poursuivre leurs actions sociétales.

Qu’en est-il du côté des associations, fondations, fonds de dotation qui ont fait preuve d’une grande agilité ? Quels sont aujourd’hui leurs enjeux de communication ? 

L’association L’ENVOL a rapidement pris la mesure de la crise sanitaire. Cette association qui organise des séjours et des activités pour les enfants malades a immédiatement mis en place un comité de communication de crise hebdomadaire pour définir les enjeux, tenir informé les partenaires, les bénéficiaires, suspendre les actions et les levées de fonds initialement prévues. « Il était important de définir des messages que tous les salariés partagent », raconte Eva Toccanier, responsable des partenariats et du mécénat.

S’adapter 

« Vérifier l’impact de chacune de nos communications et les définir d’une semaine sur l’autre était important pour être au plus juste », précise Eva Toccanier. Avant l’été, « nous avons refait le plan de développement de l’association avec les grands axes sur lesquels anticiper et communiquer ».
Au-delà du Covid-19, la capacité d’adaptation doit être au cœur de l’organisation et de la communication de ce type d’organisation selon Aurore Friedlander. « Quand on est dans des actions de mécénat, qu’on défend une cause, il faut tout le temps s’adapter. Il faut utiliser le contexte, il ne faut jamais être hors sujet, il faut saisir les opportunités », explique la directrice marketing, communication et fundraising d’Arts et Métiers ParisTech. Ancienne directrice communication et fundraising de la SPA, responsable fundraising du Secours Populaire, son expérience lui montre que les associations sont assez exemplaires, « elles doivent toujours avoir un plan B pour trouver des moyens ». 

 Elles ont d’ailleurs prouvé leur agilité tout au long de cette crise. Alors que les entreprises ont dû travailler leur organisation, les associations se sont adaptées pour agir sur leur proposition de valeur. « Elles se sont immédiatement posé la question : où ai-je intérêt à agir ? C’est l’ADN même d’une association de trouver une solution sur son axe d’action. Avec un premier levier qui est leur logique d’engagement », explique Caroline Germain, directrice générale de l’ADASI, organisme qui accompagne les associations et fondation. 

Définir une ligne éditoriale 

Il faut cependant, pour communiquer sur son activité, une ligne éditoriale formalisée. « Notre style de communication est empathique et positif, c’est encore plus vrai aujourd’hui », note Eva Toccanier. Avec ce ton positif qui lui est cher, L’ENVOL a ainsi décidé de ne pas mettre en place une campagne d’urgence, dont le ton est souvent alarmiste, mais plutôt de témoigner et de communiquer sur les programmes ludiques créés pendant et après le confinement. 

« Juste avant la crise sanitaire, nous avions mené, avec une agence, un travail de redéfinition de notre plateforme de communication afin qu’elle soit en phase avec nos nouveaux développements. C’était important de faire un point sur l’identité de l’association, travailler les missions, les valeurs et le positionnement. Ce travail a permis d’avoir les bonnes bases pour notre communication et de livrer rapidement les bons messages en toute légitimité », précise Eva Toccanier. 

Être aligné sur ses valeurs

 « Les partenariats fonctionnent quand il y a une sincérité d’engagement, une convergence d’axes stratégiques : on sait où on va, pourquoi on le fait et au service de quelle communauté. On est tous là pour faire de la communication, mais être utile au projet que nous avons identifié est au cœur de tout », constate Armelle Arrou Head Corporate Communication, Events & Partnerships à l’UNESCO. « La crise renforce les enjeux de valeurs. Beaucoup d’entreprises comprennent que les clients ou les salariés sont des citoyens. Elles pouvaient être dans un engagement facial, mais la crise les force à un engagement sincère ». Au-delà du story-telling, on entre dans l’ère du story-doing.

« Notre façon d’aller chercher des partenaires est bien alignée sur nos valeurs, nous nous présentons comme le leader d’un écosystème où chacun a une valeur ajoutée et une capacité d’appropriation du projet qui est source de fierté pour les collaborateurs ». 

Un alignement avec ses valeurs chez Arts et Métiers qui n’a pas constaté d’annulations sur des projets de partenariats depuis le début de la crise. « On ne voit pas encore tous les effets de la crise. Mais nous sommes alignés dans notre communication sur ce que nous défendons depuis longtemps, une présence sur tout le territoire au plus près des industries. Nous sommes à l’avant-poste sur tout ce qui concerne la réindustrialisation », note Aurore Friedlander.

Intégrer la visibilité dès la genèse d’un projet 

 La communication doit être réfléchie en amont. « La projection sur la capacité à lever des fonds va définir notre communication », explique Eva Toccanier de L’ENVOL. À l’Unesco, une des clés pour aller chercher du financement autour d’un projet est de proposer un attelage de partenaires, « une association de valeur autour d’un projet collectif avec un trio institution-partenaire-média », précise Armelle Arrou. Comme le projet #Wiki4women, pour promouvoir une meilleure représentation des femmes de savoir, qui réunissait autour de l’UNESCO, Wikipedia et la fondation Chanel. 

Communiquer sur le fond…  

« Nous ne communiquons pas sur le fonds de dotation, pas d’auto-promo. Nous communiquons sur nos thèmes qui sont des sujets militants comme l’agroécologie en circuit court, la place des réfugiés, affirme Chloé Freoa du Fonds de dotation Merci. C’était le cas avant la crise et je pense, qu’en plus, c’est le bon moment de communiquer car de nombreuses entreprises et citoyens ont compris que la solidarité était déterminante ». Pour la directrice déléguée du fonds de dotation Merci, « c’est toujours le projet qui doit être beau » ! 

… sans négliger les outils marketing 

« Dans une entreprise, c’est le produit qui fait le succès. Dans une association, il n’y a pas de produit, il faut cibler le message, les donateurs… les questions marketing sont essentielles aujourd’hui », précise Aurore Friedlander. 

« Nous avons travaillé sur une base segmentée (partenaires, donateurs particuliers, bénévoles, familles) qui permet une communication avec chaque acteur », précise Eva Toccanier qui se réjouit que L’ENVOL soit très présent sur le digital. C’est une force pour l’association rodée aux canaux digitaux (mailings, réseaux sociaux, Google Ads…) et qui ne réalise en imprimé que l’appel de fonds de fin d’année. L’équipe de l’association n’hésite pas à innover. Pendant le confinement, elle a organisé un événement avec des gamers et Oxymore Esport, profitant de leur influence pour une collecte de fonds. « Cet événement nous a permis d’apprivoiser leurs codes, d’appréhender ce milieu qui offre de nouvelles opportunités », dit Eva Toccanier. 

Chloé Freoa, dont l’organisme cultive la discrétion [Le fonds Merci utilise en grande majorité le patrimoine personnel de la famille Cohen pour investir dans la solidarité NDLR], utilise essentiellement Instagram, LinkedIn et une newsletter. Pendant le confinement, pour permettre au restaurant de Julien Cohen de livrer plus de repas aux familles en situation de précarité et aux hôpitaux, la newsletter a été utilisée pour collecter des fonds avec efficacité. 

Penser local

Enfin, la crise a renforcé l’importance d’une communication ancrée dans le terrain et la proximité. L’Unesco travaille beaucoup avec des entreprises internationales en recherche d’une approche moins « globale ». « Notre capacité à faire la jonction entre le global et le local avec notre réseau de terrain (ONG, réseaux de villes…) permet une action et une visibilité locale, voire micro-locale », déclare Armelle Arrou. 

Plus que jamais les associations, fondations, mais aussi mécènes, doivent travailler leur visibilité, créer un contenu pertinent profondément lié à leur raison d’être, mettre le contenu au centre de leur communication.

 

Quelles sont les spécificités de la communication pour le fundraising ?

Du concret 
On communique sur des éléments tangibles « avec X euros, on mène telle action », on donne des exemples de ce qui est fait, des témoignages.

De la différenciation
« Il faut expliquer sa spécificité, car souvent les associations font beaucoup de choses, précise Aurore Friedlander. La moitié des personnes qui donnent sont multidonateurs, pour plusieurs causes, ils doivent être informés des actions menées et de leurs spécificités. »

De l’émotionnel
Il faut toucher les gens, atteindre leur générosité, les intéresser. Répondre à un besoin émotionnel, sans culpabiliser, sans misérabilisme.

> Découvrez comment élaborer votre charte éditoriale 

 

Quelques exemples

Jouer la carte de l’humour
Le film déjanté et bourré d’humour « Money makes money » réalisé par Isaac Nabwana pour l’ONG Communities for Developpement.

Utiliser des ambassadeurs
La campagne OSONS de la Fondation Nicolas Hulot a développé un kit de communication mis à disposition de tous. Résultat : plus de 7 millions de vues sur Facebook et plus de 500 000 signatures de la pétition.

 

Proposer des contenus pratiques
Les campagnes ISF utilisent différents formats de contenus serviciels : tutoriel vidéo, utilisation des dons par projet, guide fiscal, étude IPSOS-ISF, calculateur ISF…

 

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